POURQUOI DES CRITERES GEOGRAPHIQUES POUR DETERMINER LES COLS SUISSES
Une liste de cols cyclables de Suisse est une entreprise
ardue. Elle ne l'est pas, si l'on se contente d'appliquer la rêgle des Cent
Cols au sens étroit : ne retenir que les cols en ayant l'appellation. Dans
ce cas, ne retenons que les "col", "pas", "pass",
"passo", lücke", "scharte", "porte", "tür",
"tor", "portico", bref, les termes non ambivalents (enfin,
en principe). Nous obtenons 60 cols sur route ou sur piste. Ajoutons-y quelques
synonymes ambivalents tels que "höchi", "schneit",
"joch", et nous arrivons à 79 cols. Maintenant, jetons un œil sur
les cartes Michelin : on s'aperçoit que cette collection, à l'instar
d'autres collections de cartes, indiquent, par le biais d'un symbole non équivoque,
des cols, qui n'en ont pas le nom. Citons "La Vue des Alpes",
"Schallenberg", "Hauenstein"... On peut ajouter que des cols
qui ont, sur les cartes topographiques suisses, un simple nom de lieu-dit,
deviennent notamment sur la Michelin des cols en bonne et dûe forme :
Sonloup, la Gueulaz...
Enfin, comparons ces 79 cols cyclables avec une région
française montagneuse comparable en surface, et assez comparable en densité de
réseau cyclable. Car le réseau suisse est nettement plus dense que les cartes
Michelin, pourtant au 1:200 000, ne le laissent apparaître (de nombreux CV ne
sont pas indiqués, sans parler des pistes). En France, cela correspond
sensiblement aux départements 74-73-38-26-05-04-06. On obtient 504 cols
routiers (parmi les 79 cols suisses, des pistes). Ne dites pas que la Suisse
n'est formée que de hautes montagnes, avec de rares routes : l'essentiel
du pays est constituée de moyenne montagne, assez proche de la Drôme par
exemple.
Peut-on donc se satisfaire d'un si grand écart, en
observant que les cartes routières elle-mêmes font fi de la toponymie pour
indiquer ce qui est col ? J'ai cherché à voir si l'on ne pouvait trouver
d'autres termes, locaux, qu'on aurait pu retenir. Notamment egg, berg, alp (j'ai
exclus matt, moos, schwand qui, bien qu'on les retrouve sur certains cols, ne
font nullement allusion à l'aspect montagneux du lieu). Hélas, ces termes ne
reviennent respectivement que 36, 46 et 15 fois, et de plus s'appliquent aussi
bien à d'autres lieux n'ayant rien à voir avec des cols. Bref, la toponymie
suisse, tout comme l'allemande, ne distingue généralement pas dans la
toponymie entre les cols, les caps, les sommets, etc...tout comme nous ne
distinguons pas dans la toponymie entre les ruisseaux et les rivières ou
fleuves (songez aux creeks et rivers US clairement dénommés ainsi).
Le
Club des Cent Cols dispose d'une liste de 166 cols suisses, tirés apparemment du TCS
(Touring Club Suisse). On observera que la présentation (dans tous les cas, le
simple nom du lieu. Exemple : Susten, au lieu de Sustenpass) ne permet pas de
savoir ce qui porte le nom de col et ce qui ne le porte pas (tel que la Vue des
Alpes). A partir de là, le critère pour retenir un col n'est pas indiqué, et
en tout cas absolument pas lié à la condition expresse de la toponymie (il
faut un col en ayant le nom). Ce qui est du reste tout à fait normal, car la
tradition culturelle/linguistique de la Suisse fait qu'ils n'ont pas l'habitude,
pour les cols non majeurs ou historiques, ne s'encombrer du nom "col".
Le hic, c'est que cette liste, dont les critères de sélection ne sautent pas
aux yeux, retient dans sa liste 60 lieux qui n'ont strictement rien à voir avec
un col : parfois au sommet d'une route, voire sur un sommet (exemple: Chalet
Dernier), ou, quelquefois, qui sont de bien légers cols (dépression de
quelques mètres). Il me semble qu'il s'agisse plus d'une liste des points les
plus hauts de Suisse accessibles à vélo, que d'une liste de cols Suisse.
Je propose donc une liste établie selon des critères
clairs, et relativement simples d'application :
* tout d'abord, retenir tout les
cols nommés officiellement, ainsi que ceux apparaîssant sans ambiguité sur
une carte routière, pour peu qu'ils correspondent aux critères minima d'un
col. Bellevue, qui apparaît comme col sur Michelin, est un col bien "léger"
(il n'est dominé, d'un côté, que par un "sommet" 11 m plus haut),
mais un Cent Coliste comprendrait mal qu'on rejette un col reconnu par une carte
routière, du moment qu'il s'agit bien d'un col, même minimal.
* ensuite, retenir tout col suffisamment net, avec l'impératif d'avoir un nom de lieu-dit certain. Ce qui peut aider, outre les cartes topo, ce sont les pancartes, destinés aux randonneurs, qu'on trouve à une majorité de cols, avec le nom du lieu et l'altitude. Cela aide d'autant plus qu'on retrouve ces pancartes principalement aux cols (sinon sur les sommets) plus rarement ailleurs, ce qui évite des équivoques.
Pour autant, pour éviter une liste excessive, je suggère
donc de limiter cette liste aux cols répondant aux minima suivants :
* tout comme les cols offciels,
il faut que ces cols correspondent bien entendu dans le principe à la définition
généralement admise du mot col : "dépression dans une ligne de crête".
La ligne de crête peut n'être, d'un côté, qu'un dernier sommet, et le col
peut très bien ne pas faire passer d'une grande vallée à une autre.
N'oublions pas qu'une vallée peut ne faire que quelques dizaines de mêtres, et
n'être qu'un torrent...Bref, quelles que soient les différences d'apparence
physique entre les cols (cols de cirque, etc...), ils correspondent toujours à
cette définition minimum, et sont tout à fait déterminables sur une carte dotée
de courbes de niveau.
* il faut que le col soit situé
au moins 50 m plus haut que le point le plus bas dans les 2 km environnants.
Ainsi, on évite de considérer comme col une "dépression" entre deux
montagnes, dans une région quasi-plate. La meilleure illustration en serait en
France la Combe de Savoie, qui sans cette condition serait un col. J'ajouterais
l'option suivante : "50 m....2 km OU 100 m dans un rayon de 4 km". En
effet, un seuil de col peut être parfois assez long, cet ajout permettrait de
tenir compter aussi des longs seuils (du style du Malojapass, qui par chance
est, sur le flanc ouest, un col suffisamment net), pour peu qu'ils correspondent
tout de même à une montée assez sérieuse depuis le fond de vallée. Mais je
n'ai pas voulu alourdir la présentation des cols Suisses de cet ajout, car mis
à part justement le Malojapass, le cas ne semble pas se reproduire pour
d'autres cols.
* il faut que le col passe entre
deux sommets le dominant, de chaque côté, d'au moins 50 m. Ces sommets devront
être à une distance maximum de 1,5 km du point central du col, afin qu'il
existe bien un aspect visuel de col. Je n'ai ainsi pas retenu le Boezberg (en
fait, Neu Stalden) de la liste dite "TCS", au motif que, d'un côté,
le sommet est situé 39 m plus haut, et que, de plus, ce sommet est à 2 km du
col. Autant dire qu'en passant cet endroit, on n'a pas franchement l'impression
de franchir un col, mais en fait un plateau tout juste relevé sur un côté.
Par contre, j'ajoute là encore une alternative, pour tenir compte des seuils
larges : "50 m ...1,5 km OU des sommets dominant le col de 100 m à 2,5 km
maxi". S'il se trouve en effet un sommet de plus de 100 m à cette
distance, le caractère col est suffisamment net.
Bien entendu, ces critères sont arbitraires. Pourquoi 50
m, pourquoi pas 40 ou 100 ? Mais les critères toponymiques sont souvent
plus arbitraires qu'il n'y paraît. Ainsi, pourquoi retenir le mot
"pas", alors que dans au moins le tiers des cas en France, ce mot ne désigne
pas un col ? Et à partir de quand ou de quoi un "pas" sera admis
comme col ou non ? Il convient de relativiser le caractère dit
"absolu" de la toponymie. Les critères, aussi arbitraires qu'ils
soient, doivent être clairement définis, c'est le cas de cette liste. La
toponymie est, dans le cas français, la meilleure source, la plus simple, mais
devient souvent trop rigide, voire trompeuse ou inexacte à l'étranger, et
notamment en Suisse.
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